Tourisme : vers une intelligence territoriale ?
Depuis les années 1990, la France reste la première destination touristique mondiale. S’il est certain que notre diversité régionale, notre gastronomie et notre patrimoine légendaires sont autant d’atouts qui participent à notre attractivité et notre renommée, nous devons prendre en compte la concurrence mondiale de plus en plus vive. Afin de garder cette longueur d’avance, de nouvelles réflexions territoriales voient le jour. Aujourd’hui l’objectif de nombreuses destinations touristiques consiste à adopter un projet global de destination qui transformerait un territoire en une « marque ». Ces modèles en question ont l’avantage d’être sur-mesure et de hisser la coopération au rang de valeur primordiale. Quels sont les enjeux ? Quels sont les pièges à éviter et les exemples à suivre ?
Une stratégie nationale
Alors que l’article 111-1 du code du tourisme prônait déjà la coopération dans le secteur touristique, la dernière réforme des collectivités territoriales de 2010 va plus loin. L’objectif est d’inciter ces projets de synergie entre organismes territoriaux et collectivités locales en partageant les domaines de compétences. Le législateur incite ainsi les destinations touristiques à s’adapter aux nouvelles donnes internationales. Si l’innovation est le maitre mot de ces projets, il n’en reste pas moins que chaque entité conserve sa liberté et ses spécificités territoriales.
Au niveau national, la création du Conseil Supérieur des Territoires parachève cette volonté de mutualisation des moyens. Outre l’objectif de réaliser des économies d’échelle, les destinations doivent rester flexibles pour séduire différentes cibles de marché. Dans cette logique de travail en réseau, les possibilités sont infinies. Toutefois, certaines conditions préalables sont à respecter afin d’assurer l’efficacité d’un projet. L’état d’esprit et la confiance sont nécessaires, tout comme la capacité à donner du sens au projet ainsi que la définition des règles.
Destination et Territoire, une distinction nécessaire
Si l’enjeu de compétitivité internationale reste prégnant, la précipitation peut rapidement desservir une cause. Ainsi en amont, il est nécessaire de différencier le territoire (qui va nourrir la marque par ses valeurs intrinsèques) et la destination (vitrine virtuelle qui sert à promouvoir le territoire). Cette dernière ne peut en aucun cas supplanter le territoire. Par ailleurs, la vision uniquement mercantile d’un territoire représente une instrumentalisation dangereuse de son identité. Une stratégie de marque pérenne et efficace suggère une fédération et une formation de tous les acteurs locaux. Sans ce respect et cette volonté collective, aucun projet ne peut éclore et se construire.
Comme l’a engagé le Limousin, le travail de fond qui va nourrir l’identité territoriale et in fine le positionnement marketing reste un préalable essentiel.
Deux exemples probants : Savoie Mont-Blanc & Montagnes du Jura
En 2006, les départements de Savoie et de Haute Savoie ont adopté une marque de destination unique : Savoie Mont-Blanc. Les enjeux étaient clairs : « faire ensemble » pour assurer une meilleure visibilité de la région au niveau national et international et permettre aux habitants de s’approprier ce nouveau territoire. Aujourd’hui le nouvel axe de travail est de construire un système d’actions cohérent qui doit créer de la valeur pour la marque.
A moindre échelle, le Jura a également créé une marque de destination : Montagnes du Jura. Souffrant d’un manque de notoriété, le Conseil Général du Jura a souhaité se lancer dans une aventure similaire. Les objectifs principaux sont de développer une renommée européenne, d’attirer une nouvelle clientèle afin de désaisonnaliser la destination et de structurer l’offre touristique.
Même si l’organisation autour de ces projets collaboratifs reste difficile à engager, ces tentatives tendent à se multiplier et permettront sans soute à la France d’affirmer sa compétitivité sur la scène internationale.
Source : Espace Tourisme & Loisirs, Marques de destination – N°303, Mai 2012
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